Une française mise en prison à Madagascar

         Ma maman est venue de France pour me rendre visite et me donner à manger, car les détenus n'ont comme nourriture que du manioc et un peu de maïs, a ce régime là, personne ne tient guère longtemps…. Maman m'apportait tous les matins et midi mes soubiques contenant mes repas de la journée, elle en mettait pour un régiment à chaque fois car elle se doutait bien que des copines de cellule ne mangeaient pas à leur faim, alors nous partagions et c'était un grand plaisir de les voir se régaler...

Les journées étaient longues, elles commençaient à 5h00 du matin pour la prière du matin, puis les pénitencières ouvraient la porte de la chambre à 6h00, les premières corvées commençaient ; nettoyages des toilettes, de la cour …. Ensuite nous allions nous laver, attendre notre tour dans les douches, puis c'était le nettoyage la chambre " le service " ; l'appel des détenues vers 8h00. Le comptage terminé, il ne nous restait plus qu'a attendre…. J'attendais ma soubique, une visite de l'ambassade de France, de la famille : Quel plaisir quand on nous appelait " Natacha, AU POSTE !!! " chouette une petite sortie… Je me disais !!!!

Quand on était en forme on essayait de rire ou de faire rire les autres femmes, (ma grande spécialité !!!). J'adorai faire des blagues, raconter des âneries, ce qui ne changeait pas beaucoup de mes habitudes, j'aime rire, alors même au fond du trou j'essayais de prendre la vie du bon coté... oh ! Je ne vous dit pas que je n'ai pas eu des moments très noirs, ou tout s'écroulait, mais ma force pendant plus d'un mois fût mon humour et voir les autres détenues rire de mes sottises m'amusait d'autant plus que cela engrangeait un fou rire général même au niveau des pénitencières !!!! Mon humour , mes rires , une victoire sur Mr Dailly qui ne m'a jamais pu enlever !Il pensait surement que je ne résisterai pas une journée a cet enfer mais quelle a dû etre sa surprise en me voyant au tribunal toujours en vie au bout de deux mois de détention !!!

         Je lisais énormément, beaucoup de romans ce qui me permettait de pouvoir m'évader un peu vers d'autres horizons, vers d'autres mondes…. Mais la réalité revenait vite au galop quand j'entendais sans cesse ce bruit infernal du loquet de la lourde porte, des nouvelles entrées comme on disait, encore et encore des femmes incarcérées, cela ne cessait jamais… Des femmes aux regards vidés, des femmes avec parfois leur bébé dans les bras, on leur souriait comme pour leur dire que tout allait bien se passer, pour les encourager à être fortes, nous étions toutes solidaires, et nous ne portions aucun jugement entre nous, nous ne sommes ni leurs juges ni leurs bourreaux, nous étions toutes dans le même sac, alors notre rôle à chacune d'entre nous était d'être soudée pour ne pas que l'autre sombre….

Vers 17h45 le dernier appel du soir était lancé, nous étions comptées de nouveau et ensuite "parquées" dans notre chambre. 18h00, prière du soir , puis heure du dîner vers 18h45, et dodo .Impossible de bien dormir dans ces conditions, non seulement on était tassées , mais il y avait en permanence une ampoule de 100 W allumée, puis venaient les ronflements de certaines , cela devenait vite un cauchemar , de plus il fallait gérer les cafards qui voulaient prendre place dans nos couvertures, déjà qu'on avait pas de place, alors ce n'était pas pour y loger d'autres compagnons de cellule !!!! Il n'y avait pas de toilettes dans la chambre, donc si on avait une petite envie durant la nuit, il fallait ce contenter d'uriner dans des sceaux hygiéniques qui se trouvaient dans le couloir de la chambre, à la vue de toutes les autres femmes, et si par malheur, on était pris de maux de ventre, il fallait tambouriner à l'épaisse porte , réveiller la pénitencière pour pouvoir accéder aux toilettes de la cour dans le noir et au milieu des rats... Il valait mieux ne pas tomber malade !!!!

Voilà une journée habituelle à Antanimora…